Voyage au cœur du Mâconnais : géographie et grands terroirs d’un vignoble incontournable

Situé dans la partie méridionale de la Bourgogne, le Mâconnais s’étend en un long ruban de collines verdoyantes, pont naturel entre le Beaujolais au sud et la Côte Chalonnaise au nord. Cette région viticole, souvent moins médiatisée que ses voisines, déploie pourtant un caractère bien affirmé et une mosaïque de terroirs d’une grande richesse. Le Mâconnais se distingue par ses paysages doux, sa diversité géologique impressionnante et un patrimoine culturel associé à la vigne depuis l’époque gallo-romaine.

Le vignoble du Mâconnais s’inscrit administrativement dans le département de la Saône-et-Loire (71), en région Bourgogne-Franche-Comté. Son centre névralgique est la ville de Mâcon, tournée vers la Saône, à une vingtaine de kilomètres de Cluny et près de la frontière historique avec le Rhône. Il s’étire sur environ 50 km du nord au sud, de Sennecey-le-Grand à Saint-Vérand, et couvre une superficie avoisinant 6 800 hectares de vignes (BIVB - Bureau Interprofessionnel des Vins de Bourgogne).

Le Mâconnais est une terre de contrastes : collines calcaires, falaises spectaculaires (emblématiques comme celle de la Roche de Solutré), vallons bucoliques, bois et prairies. Cette variété s’explique par une géologie complexe : alternance de sols calcaires, argilo-calcaires, marnes et sables, qui vont influencer la typicité des vins produits sur chaque coteau.

Historiquement, ce sont les moines des abbayes médiévales, notamment Cluny et Tournus, qui ont structuré le paysage viticole, défrichant les pentes favorables et sélectionnant les cépages les mieux adaptés. Aujourd’hui, cette tradition viticole continue de nourrir une identité propre au Mâconnais, entre classicisme bourguignon et esprit méridional.

• Au nord : la Côte Chalonnaise, autour de Givry, Mercurey et Rully.
• À l’est : la rivière Saône, qui marquait autrefois la limite naturelle des vignobles, désormais terre de vergers et grandes cultures.
• À l’ouest : les monts du Mâconnais, qui annoncent les contreforts du Massif central.
• Au sud : le Beaujolais, dont la frontière viticole est matérialisée par le village de Saint-Vérand (et la célèbre Roche de Solutré non loin).

Ce carrefour donne au Mâconnais une originalité remarquable : les vins évoquent parfois la fraîcheur bourguignonne, parfois le soleil du sud et l’accent du Gamay voisin.

Les grandes familles d’appellations

Le Mâconnais s’articule autour de plusieurs grands types d’appellations, qui résonnent chez l’amateur de vin.

• Appellation régionale : Mâcon, déclinée en blanc, rouge et rosé. Elle couvre une grande partie du vignoble, mais seuls les vins répondant à un cahier des charges strict peuvent y prétendre.
• Appellations communales : Plus restrictives, réservées aux villages disposant de terroirs particulièrement qualitatifs et d’une tradition viticole ancienne (ex : Mâcon-Solutré-Pouilly, Mâcon-Chaintré, Mâcon-Lugny…).
• Appellations villageoises d’élite (les « crus » du Mâconnais) : Saint-Véran, Pouilly-Fuissé, Pouilly-Loché, Pouilly-Vinzelles et Viré-Clessé, tous exclusivement produits en blanc à partir du Chardonnay.

En tout, le vignoble du Mâconnais compte 5 900 hectares en AOC, dont près de 5 000 hectares consacrés aux vins blancs (Chardonnay quasi-exclusif) et 800 hectares environ pour le Gamay noir à jus blanc (rouges/rosés) (BIVB).

Petite histoire du Chardonnay et du Gamay dans le Mâconnais

Deux cépages règnent ici : le Chardonnay (pour plus de 95 % des blancs) offre des vins aromatiques, oscillant entre fruits mûrs, fleurs blanches, minéralité et notes beurrées selon le terroir. Le Gamay s’exprime surtout au sud, donnant des rouges souples, croquants, parfois épicés, parfaits pour la table.

Le Mâconnais se subdivise en cinq grands secteurs, chacun avec sa personnalité et ses crus phares. Voici une exploration détaillée des zones qui façonnent le style et la réputation du vignoble.

1. Secteur Nord : Viré-Clessé et la porte de la Bourgogne méridionale

Le nord du Mâconnais amorce la transition avec la Côte Chalonnaise. Il est dominé par l’appellation Viré-Clessé, reconnue en AOC depuis 1999, seule appellation du Mâconnais exclusivement dédiée aux vins blancs issus du Chardonnay. Viré-Clessé est réputée pour ses arômes d’acacia, de miel et de fruits blancs, mais aussi pour la fraîcheur due aux expositions nord/est et à la présence de sols argilo-calcaires légers.

• Villages clés : Viré, Clessé, Laizé, Montbellet
• Superficie : environ 390 hectares
• Particularités : récolte parfois tardive, vins de grande garde dans certaines années

2. Secteur Central : Lugny, le cœur du Chardonnay mâconnais

Au centre du vignoble, Mâcon-Lugny s’impose comme un nom familier sur les tables françaises. C’est ici que la cave coopérative–l’une des premières créées en Bourgogne en 1926–a lancé la notoriété du Mâcon-Lugny, aujourd’hui produit phare avec près de 1 200 hectares de vignes (source : Cave de Lugny).

• Villages clés : Lugny, Saint-Gengoux-de-Scissé, Burgy, Cruzille
• AOC spécifiques : Mâcon-Lugny, Mâcon-Burgy, Mâcon-Cruzille
• Particularités : Style fruité, notes d’agrumes, bouche ample et souvent florale. Bon rapport qualité/prix pour découvrir l’appellation.

3. Le triangle d’or du sud : Pouilly-Fuissé, Pouilly-Loché et Pouilly-Vinzelles

Au sud de Mâcon, on touche à l’élite du vignoble avec le fameux triangle de Pouilly, véritable fer de lance du Chardonnay bourguignon. Le terroir calcaire, les coteaux en amphithéâtre et la douceur du climat composent des blancs profonds, qui rivalisent en prestige avec la Côte de Beaune et la Côte Chalonnaise.

• Pouilly-Fuissé : environ 800 hectares, 22 climats classés en 2020 en Premier Cru (une première dans le Mâconnais, source : la-cave.fr).
• Pouilly-Loché et Pouilly-Vinzelles : AOC de plus petite taille, avec seulement une quarantaine d’hectares chacune. Ces appellations confidentielles déroulent des expressions nuancées de Chardonnay, à la fine minéralité, et sont recherchées pour leur potentiel de garde.
• Villages clés : Fuissé, Vergisson, Solutré-Pouilly, Loché et Vinzelles

Une anecdote : la Roche de Solutré, majestueuse falaise calcaire, fut un lieu de rassemblement annuel du président François Mitterrand, symbole du patrimoine et de la renommée du Mâconnais !

4. Le secteur de Saint-Véran : l’expression solaire et minérale

Créée en 1971, l’appellation Saint-Véran se déploie autour du village éponyme, enserrant même Pouilly-Fuissé au sud et à l’ouest. Elle totalise environ 730 hectares, répartis sur huit communes.

• Villages clés : Saint-Vérand, Prissé, Davayé, Leynes, Chânes...
• Particularités : Chardonnays généreux, notes de fruits à noyaux, souvent une sensation d’onctuosité portée par le climat plus ensoleillé. Parfait sur une cuisine de terroir, comme la volaille de Bresse à la crème !

La légende locale raconte qu’on y produit les « vins du soleil levé », tant l’exposition sud-sud-est forge des blancs chaleureux et rayonnants.

5. Le secteur Sud et la frontière du Beaujolais : Mâcon et ses villages

Plus au sud, le Mâconnais prolonge ses vignes jusqu’à Saint-Vérand–porte d’entrée sur le Beaujolais. C’est ici que les vins rouges issus du Gamay trouvent leurs plus belles expressions locales, notamment dans les AOC villageoises comme Mâcon-Charnay-lès-Mâcon, Mâcon-Péronne ou Mâcon-Chaintré. Zones à découvrir pour des cuvées conviviales, gourmandes, à partager entre amis.

• Villages clés : Charnay-lès-Mâcon, Vinzelles, Chaintré, Chasselas, Saint-Vérand
• Particularités : Vins rouges souples, rosés fruités, et superbes blancs, parfois avec une pointe d’exotisme grâce à la chaleur méridionale. Certains terroirs partagent leurs frontières géographiques avec le Beaujolais… et les influences stylistiques !

• 80 % de la production du Mâconnais part à l’export : preuve de son succès international (source : BIVB).
• Les vins du Mâconnais représentent près de 36 % de la production totale de la Bourgogne vinicole (rouge, blanc, rosé confondus).
• Près de 900 exploitations viticoles forment le tissu local, dont une vingtaine de caves coopératives (certaines parmi les plus importantes de Bourgogne, comme la Cave de Lugny).

Un saviez-vous ? La Mâcon Wine Note, festival printanier à Mâcon, attire chaque année près de 12 000 curieux et amateurs venus de toute l’Europe découvrir les pépites du vignoble.

Le Mâconnais est à la croisée des chemins : région à la fois historique et pionnière. Ces dernières années, de nombreux domaines se sont engagés dans l’agriculture biologique et la biodynamie, offrant une nouvelle lecture des terroirs et une belle diversité aromatique. Plus de 18 % du vignoble était déjà certifié en bio ou en conversion en 2021 (Sources : Agence Bio/BIVB).

La percée des Premiers Crus sur Pouilly-Fuissé, la multiplication de cuvées parcellaires, la mise en valeur du Chardonnay dans toutes ses nuances : le Mâconnais vit pleinement un renouveau, bien loin du simple vin de soif d’antan. Les vignerons aiment partager leur passion et leur histoire lors de dégustations à la propriété–une excellente occasion de découvrir la sincérité de l’accueil mâconnais.

Sillonner les routes du Mâconnais, c’est parcourir un territoire où chaque village décline le vin à sa façon : festivals, marchés de producteurs, sentiers viticoles balisés, hébergements de charme au cœur des vignes... Des crus confidentiels à l’effervescence des grandes caves, des panoramas sur la Roche de Solutré à la douceur du Val Lamartinien, le Mâconnais offre mille raisons de s’y attarder, quelles que soient la saison ou l’expérience en dégustation.

Du printemps, avec la floraison des ceps, à l’automne, période chatoyante des vendanges, chaque moment révèle une facette différente de ce vignoble chaleureux et encore méconnu. Un voyage gustatif et humain à la rencontre du vrai visage du Mâconnais.

Sources : BIVB (Bureau Interprofessionnel des Vins de Bourgogne), Cave de Lugny, Agence Bio, www.la-cave.fr, région Bourgogne Tourisme, Association Viré-Clessé.